Les pontons
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Les pontons
Prenez un fier vaisseau de ligne, démâtez-le, fermez les sabords d’un grillage et embossez-le dans une rade. Entassez dans ses ponts et ses batteries quelque mille cinq cents à mille huit cents individus, parmi lesquels parfois des femmes, et vous obtenez un ponton, c'est-à-dire un mitard flottant. Sorte de quartier de haute sécurité où l’on soufre en prime du mal de mer, une geôle infecte, humide, répugnante, qui va faire naître le désespoir le plus vif et mener abjections les plus viles.
La Vieille Castille, réservée aux officiers, se montre plus accueillante toute proportion gardée. Ceux-ci ont la permission de monter prendre un bol d’air sur le pont. Les officiers sont regroupés en escouade, ou, de façon plus imagée, en « plats de sept ». La journée, ils peuvent jouer aux échecs ou au bouchon
Le Terrible, pour le prisonnier sur ce ponton des sans-grade, il n’y avait pour toute nourriture qu’une ration de pain et une gamelle de fèves ou de riz. Et même pas tous les jours. Le pire, c’était le manque d’eau. Sans parler de l’hygiène élémentaire, la pénurie d’eau, cinq jours d’affilée, parfois.
La Horca, que les Espagnol sont bourrée de marins simples matelots. Les premiers arrivant n’avaient rien trouvé à son bord, ni eau, ni nourriture. La pénurie avait durée six jours. Pour mettre fin à leurs tourments, un grand nombre s’étaient jetés à l’eau. Facilement repris par la chaloupe assurant la police maritime, ils avaient été fusillés sous les yeux de leurs camarades.
Taraudés par la faim, les matelots dévorent alors tout ce qui peut fondre, même difficilement, sous la dent : leurs chiens, jusqu’alors leurs compagnons fidèles, sont rongés jusqu’au dernier os. Puis les bottes, les souliers, les havresacs même, sont avalés. Finalement, pour suppléer à la révoltante incurie des « barbares chargés de pourvoir à leur subsistance », les affamés doivent se résoudre à la répugnante obligation de se régaler de ceux qui succombent les premiers. Encore ne s’agit-il que des cadavres
Bientôt la mortalité n’est plus suffisante pour assurer la subsistance. L’alternative est simple : vivre, et à n’importe quel prix ou crever. Nécessité faisant loi, on décide de sacrifier sur-le-champ les hommes dont la mort, de toute façon, apparaît inéluctable. On passe au vote.
Soudain, un ventre creux aperçoit « quelques nègres » qui se trouvent à bord. Ceux qui ont voté pour le sacrifice des plus faibles reviennent à la charge avec, cette fois un argument capable de balayer les dernières hésitations : le crime, si s’en est un sera moindre, car disent les partisans du sacrifice humain, il ne sera pas commis sur « des individus de leur espèce ». Les malheureux nègres allaient passer à la casserole lorsqu’un amiral anglais, ému par la détresse vomie par cet enfer flottant, révolté à la vue des débris hideux qui flottaient sur l’eau, envoya vers la Horca une chaloupe chargée de vivre.
L’Argonaute, un ponton-hôpital et véritable « vallée des larmes », selon l’expression d’un médecin volontaire pour servir à son bord. Sur cette carcasse déshonorée, plus de ventres arrondis, plus de triples mentons, mais en guise d’équipage, quelques six cents fantômes d’hommes, des agonisants pour la plupart. Comme pour la Horca, c’est un officier de la Royal Navy, qui envoi à couple de l’Argonaute deux chaloupes remplies à refus de légumes soigneusement préparés, des sacs de biscuits, de thé, et, pour les femmes, car il y en a à bord de ce mouroir, de sucre et de cacao.
La Vieille Castille, réservée aux officiers, se montre plus accueillante toute proportion gardée. Ceux-ci ont la permission de monter prendre un bol d’air sur le pont. Les officiers sont regroupés en escouade, ou, de façon plus imagée, en « plats de sept ». La journée, ils peuvent jouer aux échecs ou au bouchon
Le Terrible, pour le prisonnier sur ce ponton des sans-grade, il n’y avait pour toute nourriture qu’une ration de pain et une gamelle de fèves ou de riz. Et même pas tous les jours. Le pire, c’était le manque d’eau. Sans parler de l’hygiène élémentaire, la pénurie d’eau, cinq jours d’affilée, parfois.
La Horca, que les Espagnol sont bourrée de marins simples matelots. Les premiers arrivant n’avaient rien trouvé à son bord, ni eau, ni nourriture. La pénurie avait durée six jours. Pour mettre fin à leurs tourments, un grand nombre s’étaient jetés à l’eau. Facilement repris par la chaloupe assurant la police maritime, ils avaient été fusillés sous les yeux de leurs camarades.
Taraudés par la faim, les matelots dévorent alors tout ce qui peut fondre, même difficilement, sous la dent : leurs chiens, jusqu’alors leurs compagnons fidèles, sont rongés jusqu’au dernier os. Puis les bottes, les souliers, les havresacs même, sont avalés. Finalement, pour suppléer à la révoltante incurie des « barbares chargés de pourvoir à leur subsistance », les affamés doivent se résoudre à la répugnante obligation de se régaler de ceux qui succombent les premiers. Encore ne s’agit-il que des cadavres
Bientôt la mortalité n’est plus suffisante pour assurer la subsistance. L’alternative est simple : vivre, et à n’importe quel prix ou crever. Nécessité faisant loi, on décide de sacrifier sur-le-champ les hommes dont la mort, de toute façon, apparaît inéluctable. On passe au vote.
Soudain, un ventre creux aperçoit « quelques nègres » qui se trouvent à bord. Ceux qui ont voté pour le sacrifice des plus faibles reviennent à la charge avec, cette fois un argument capable de balayer les dernières hésitations : le crime, si s’en est un sera moindre, car disent les partisans du sacrifice humain, il ne sera pas commis sur « des individus de leur espèce ». Les malheureux nègres allaient passer à la casserole lorsqu’un amiral anglais, ému par la détresse vomie par cet enfer flottant, révolté à la vue des débris hideux qui flottaient sur l’eau, envoya vers la Horca une chaloupe chargée de vivre.
L’Argonaute, un ponton-hôpital et véritable « vallée des larmes », selon l’expression d’un médecin volontaire pour servir à son bord. Sur cette carcasse déshonorée, plus de ventres arrondis, plus de triples mentons, mais en guise d’équipage, quelques six cents fantômes d’hommes, des agonisants pour la plupart. Comme pour la Horca, c’est un officier de la Royal Navy, qui envoi à couple de l’Argonaute deux chaloupes remplies à refus de légumes soigneusement préparés, des sacs de biscuits, de thé, et, pour les femmes, car il y en a à bord de ce mouroir, de sucre et de cacao.
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